Mais qu’éprouva mon grand-père Gaby lors de son arrestation et de sa déportation ? .
Jacques Edouard Lévy, témoin indirect par ce lien indélébile que l’on appelle la mémoire familiale, veut comprendre, à l’occasion d’un pèlerinage à Moissac. Il s’agit de partir de la micro-histoire pour tenter de restituer à la fois les circonstances de l’arrestation de Gabriel/ Gaby Lévy, et les enjeux humains, sociaux, juridiques, économiques et existentiels de l’Occupation ; reprendre par la pensée le parcours de Gaby, dans un souhait de transmission de cette histoire singulière, qui n’est pas sans impact pour les générations suivantes. Gabriel Lévy n’était pas un personnage public, juste un citoyen français presque ordinaire, trahi comme des milliers d’autres et livré en pâture à la barbarie nazie. Son destin est celui de tant d’autres. Mais quatre-vingts ans après sa disparition tragique à Auschwitz, il mérite d’être raconté.
Dans sa « lettre testament » parvenue à un ami, Gaby écrivait : « je ne me rebelle pas, à quoi bon, un jour viendra où des hommes comme toi nous vengeront » et ... pourtant. Des hommes comme toi ou moi ? Il n’y eut ni vengeance ni, justice ... ou si peu, en dehors de symboles à abattre, comme Laval ; précisément Pierre Laval, Pétain et tant d’autres qui considéraient la déportation et le massacre de citoyens ordinaires comme un épiphénomène à l’aune des logiques nationales ou idéologiques... Mais il y eut fort heureusement pour la dignité humaine et la survie des rescapés et indirectement, l’existence de l’auteur, des résistants. Depuis, la détermination d’activistes de la mémoire comme les époux Klarsfeld, le nouvel intérêt de l’Histoire pour les victimes font comprendre que ce drame collectif et individuel constitue la pierre de touche de notre humanité. La poussière est retombée à Moissac, à Vichy, à Drancy ; mais l’aventure de Gabriel, français, bourgeois, belfortain, et accessoirement israélite d’origine, participe de la tragédie française et européenne et des milliers, des millions, qui s’évanouirent dans la fumée d’une hubris criminelle, Juifs ou non (mais essentiellement Juifs), Français ou non (mais surtout étrangers). Cet ouvrage n’est ni un livre d’histoire classique, ni un récit purement familial, mais l’itinérance d’un petit-fils en quête de vérité. Les faits sont connus : les Juifs furent pourchassés pour ce qu’ils étaient supposés être ou représenter, et non pour ce qu’ils avaient fait, indépendamment de toute logique et de toute justice.
