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Jean-Martin Cohen Solal Dr

Jeux vidéo et Ados


13,9 milliards de chiffre d’affaires en Europe en 2008.
3,8 millions de pratiquants journaliers en France
et 13 millions s’y consacrant au moins une fois par mois...
Qui suis-je ? …Le jeu vidéo !


Dérive d’un siècle en mal de repères ?
Les chiffres sont faramineux, confirmant l’engouement que, de manière intuitive, chacun d’entre nous perçoit à travers la consommation de ses enfants mais aussi de ses collègues de bureaux, de ses amis. Un engouement d’autant plus effrayant qu’à lire les tragiques faits divers rapportés par les médias, le jeu vidéo serait responsable de toutes les dérives violentes perpétrées par les adolescents et les enfants.
Le jeu vidéo est-il vraiment le mal de ce siècle ? La réponse est NON. Et pour prendre une comparaison qui parlera aux lecteurs adultes, le jeu vidéo n’est pas plus dangereux que ne l’est la lecture, pourtant pourfendue au xixe siècle… Qui, raisonnablement, aujourd’hui, oserait prétendre que « lire pousse à l’oisiveté, à la paresse et autres vices », comme le prétendait l’opinion de l’époque ? 
Le jeu vidéo est avant tout un jeu et le jeu, dans toutes les sociétés, quel que soit le lieu ou le temps, a toujours existé. Echecs, jeu de l’oie, dés, cartes, balle, paris en tous genres, à chaque époque, son jeu. Au siècle de la « domestication électronique » (PC, portable, console…) et du Web, l’activité ludique est, par excellence, le jeu vidéo ! Et celui-ci prend des formes multiples : jeux d’action, jeux d’aventure, jeux de stratégie, jeux de simulation, jeux de gestion, jeux de réflexion, jeux de plateau, jeux de rôle...

Je joue, tu joues, il joue… Est-ce normal docteur ?
L’homme est un joueur né. Car le jeu est une activité indispensable, vitale, participant pleinement au développement moteur et cérébral de l’enfant, permettant à l’adulte de se « vider l’esprit », d’évacuer le stress. En d’autres termes, le jeu permet de comprendre et de s’adapter au monde et à ses contraintes.
Ainsi, pour l’immense majorité de leurs adeptes – jeunes ou moins jeunes, les jeux vidéo sont et restent une (simple) source de plaisir. Plus, les jeux constituent des ressources externes où les jeunes peuvent puiser pour acquérir la conscience de soi et l’autonomie de penser.

Pour autant, l’addiction existe, avec un mode de fonctionnement proche de l’addiction aux drogues classiques (tabac, alcool…). S’il n’existe pas d’étude nationale sur la question, le phénomène étant trop récent, on estime – en référence aux autres addictions – que la dépendance aux jeux vidéo concernerait entre 5 et 10 % des joueurs.

Où commence et où s’arrête le fait de jouer ? À partir de quel moment le jeu cesse-t-il de devenir jeu et se transforme en addiction ?
Être « accro » s’évalue plus en termes qualitatifs qu’en termes de fréquence. Il est important ici de rappeler qu’il n’y a pas de normalité, que tout un chacun a droit à l’excès, tout particulièrement les adolescents, qui, à cet âge d’indivi-
duation de la personne, revendiquent l’indépendance, cherchent à se connaître et repèrent leurs limites. La recherche de sensations fortes relève donc d’une attitude banale.
L’addiction se mesure plus à l’isolement, à l’absence d’autres investissements (affectifs, professionnels, scolaires), qu’au nombre d’heures passées par jour devant son écran.
L’addiction aux jeux vidéo ne résulte pas d’une simple pratique du jeu. En réalité, une telle dépendance n’arrive pas par hasard. Comme toute addiction, elle est souvent la résultante d’un état de mal-être, de l’impossibilité d’assumer une réalité quotidienne source de malaise, voire de souffrance. Le jeu (en particulier ceux en univers persistant – MMORPG) offre ainsi un espace de fuite, une illusion de liberté, de reconnaissance et de communication. Comme peuvent l’offrir le tabac, l’alcool, la drogue…
En d’autres termes, le problème n’est pas la pratique du jeu vidéo – qui effraie d’autant plus que les parents méconnaissent l’objet et n’en ont que la vision d’un enfant absorbé et rivé à l’écran, au détriment des relations familiales et des activités scolaires ! Le problème tient à la personnalité et à l’environnement du joueur.
Comment réagir ?
D’abord, en comprenant à quoi joue l’enfant ou l’adolescent. Qu’est-ce que ce jeu qui semble le fasciner ?
Ensuite, en jouant à notre tour… notre rôle de parents -l’un des rôles les plus difficiles à tenir ! À côté, Dofus – classique des MMORPG – s’apparente à la marelle.
Au-delà des bouleversements liés aux changements physiques et psychologiques, au-delà des inévitables prises de becs, au-delà des incompréhensions générationnelles, il reste une chose sur lequel l’enfant s’appuiera toujours : le sentiment d’être aimé et protégé.
Enfin, en élargissant le champ des expériences de l’enfant ou de l’adolescent. En particulier, en l’incitant le plus tôt possible à pratiquer une activité physique et sportive1, activité qui, outre les bienfaits pour la santé, permet au jeune de construire un échange réel (et non plus virtuel) avec les autres.

Espérons que ce guide contribuera à réduire certaines fractures entre parents et enfants et à ouvrir des espaces mutuels de compréhension.

Dr Jean-Martin Cohen Solal
Directeur Général Adjoint de la Mutualité Française

Réalisé avec Sitedit